Le modèle permissif ne se contente pas d’un léger relâchement : il met de côté les limites et les sanctions, presque systématiquement. Loin des recommandations actuelles en éducation, cette posture s’invite dans bien des familles, parfois sans que les parents s’en aperçoivent.
Les effets de ce choix éducatif ne s’arrêtent pas au seuil du foyer. Ils imprègnent durablement la façon dont l’enfant se construit, tant sur le plan social qu’émotionnel. Pourtant, rien n’est figé : il existe des leviers concrets pour faire évoluer les habitudes parentales, limiter les dérives et préserver une atmosphère familiale où chacun trouve sa place.
Comprendre les différents styles parentaux : autoritaire, laxiste, positif
La parentalité se décline en diverses approches, chacune instaurant ses propres règles du jeu et ses conséquences sur l’enfant. Trois courants majeurs dominent les débats contemporains : l’éducation stricte, le laxisme et l’éducation positive. Ces distinctions suscitent encore bien des confusions, entretenues par des jugements rapides et des amalgames.
Le style autoritaire repose sur une hiérarchie stricte : règles inflexibles, obéissance valorisée, sanctions utilisées comme levier principal. Ici, la punition s’impose pour garantir l’ordre, mais à quel prix ? On observe vite des tensions, parfois de la violence éducative. L’enfant, cantonné à un rôle passif, apprend à respecter la norme sous la contrainte, sans espace pour le dialogue.
L’éducation laxiste, elle, se distingue par un quasi-abandon du cadre. Les repères vacillent, parfois absents, souvent négociés puis abandonnés devant la persistance de l’enfant. On confond souvent ce laxisme avec la parentalité positive, alors qu’il s’agit d’un renoncement à guider. Résultat : l’enfant avance sans boussole, peine à se situer et peut développer insécurité, difficulté à gérer la frustration, impulsivité, tendance à l’égocentrisme.
L’éducation positive trace une autre voie : poser des limites nettes tout en cultivant l’écoute, le respect et la coopération. Inspirée par les analyses d’Isabelle Filliozat et Catherine Gueguen, cette démarche cherche l’équilibre entre exigence et bienveillance. La parentalité bienveillante encourage l’enfant à exprimer ses besoins mais lui rappelle aussi les règles, condition d’un développement autonome et d’un sentiment de sécurité solide.
Parent laxiste : comment le reconnaître et pourquoi ce style pose question
Le parent laxiste ne se résume pas à une caricature de parent dépassé ou désengagé. Ici, le laxisme prend la forme d’un manque de cadre et de limites nettes. Les règles varient, se négocient sans fin ou disparaissent à la moindre insistance. La parole d’adulte s’affaiblit, la frontière entre les rôles parent et enfant devient poreuse.
Dans ce schéma, la relation parent-enfant manque de repères stables. L’enfant, placé au centre, prend parfois toute la place. Ce déséquilibre mène à la figure de l’enfant roi, résultat direct d’une absence d’autorité parentale. Bienveillance et laxisme se confondent trop souvent : répondre à tous les désirs ne revient pas à respecter les besoins réels de l’enfant.
Dire non devient difficile pour le parent laxiste. Craignant le conflit, il cherche à épargner toute frustration à son enfant, quitte à oublier son rôle de guide. Pourtant, de nombreuses études en éducation le montrent : sans cadre, l’enfant risque anxiété, insécurité, difficulté à tolérer la frustration, accès d’impulsivité. Le laxisme ne se résume donc pas à une démission : c’est l’incapacité de tenir fermement sa place, tout en soutenant l’autonomie de l’enfant. Ce déséquilibre laisse l’enfant libre, mais sans repères, et pose de réelles questions sur son développement psychique et émotionnel.
Quelles conséquences pour l’enfant et la famille ?
Grandir dans une éducation laxiste, c’est avancer sans boussole claire. L’enfant, privé de repères, doit sans cesse deviner où s’arrête sa liberté et où commence celle des autres. Cette incertitude alimente un sentiment d’insécurité. Face à la frustration, il réagit mal : colères fréquentes, tolérance limitée à la contrariété, impulsivité en hausse. Les recherches font le lien avec un égocentrisme marqué, un manque d’empathie, parfois même des difficultés à entrer en relation avec les autres.
Voici quelques effets fréquemment observés chez l’enfant élevé dans un contexte permissif :
- Difficultés à s’intégrer : l’absence de limites complique la vie en groupe. L’enfant a du mal à respecter les règles collectives, à patienter, à trouver sa place parmi les autres.
- Relations tendues : ce manque de cadre génère des tensions dans la famille. Les parents alternent entre culpabilité et agacement, tandis que les frères et sœurs peuvent ressentir injustice ou jalousie.
- Apprentissages entravés : sans structure, l’enfant rencontre des obstacles à l’école. Son attention se disperse facilement, il persévère moins, sa motivation scolaire en pâtit.
Le développement harmonieux d’un enfant demande un dosage subtil : l’expérimentation oui, mais dans un cadre rassurant. Laisser l’enfant sans règles claires ne l’aide pas à prendre confiance. Au contraire, l’incertitude renforce l’anxiété, peut conduire à un repli sur soi. Au sein de la famille, les adultes perdent la main, les disputes deviennent plus fréquentes, la communication se fragilise.
Des repères concrets pour éviter le laxisme sans renoncer à la bienveillance
L’éducation bienveillante ne s’apparente ni à la mollesse, ni à la sévérité pure. Les écrits d’Isabelle Filliozat et Catherine Gueguen offrent des pistes claires : posez des limites explicites, expliquez-les avec empathie, bannissez la violence éducative. La règle n’est pas à négocier en permanence, même si sa mise en œuvre peut s’adapter à l’enfant. Le message à transmettre : « Je t’écoute, mais la règle protège chacun de nous ».
Un cadre solide n’exclut pas la coopération. Mieux vaut expliquer que punir, privilégier la réparation à la confrontation. La parentalité positive encourage la recherche commune de solutions : face à un comportement inadapté, identifiez ce qui le motive, proposez des alternatives. Quand une sanction est nécessaire, elle doit structurer sans rabaisser.
Pour concrétiser ce cadre éducatif, quelques repères s’avèrent précieux :
- Affichez les règles essentielles – qu’il s’agisse d’horaires, de respect ou de politesse – et tenez-les avec constance.
- Gardez une posture stable, évitez les extrêmes : la fermeté rassure, la bienveillance fédère.
- Associer l’enfant à l’élaboration des règles favorise son implication : il s’agit plus de coopération que d’imposition.
Les pratiques éducatives des pays nordiques et de l’Allemagne montrent qu’un cadre respectueux n’exclut pas la fermeté. En France, les mentalités évoluent. La parentalité consciente encourage à adapter les règles à l’âge de l’enfant, à accueillir les émotions sans pour autant effacer les limites. Les découvertes en neurosciences affectives, mises en avant par Catherine Gueguen, rappellent que la sécurité intérieure naît d’un équilibre : écoute, cohérence, et des limites posées avec discernement.
À force de chercher l’équilibre entre liberté et cadre, on façonne bien plus qu’un quotidien serein : on prépare un adulte capable de se repérer, d’agir avec confiance et d’inventer sa propre voie.



